dimanche 14 décembre 2008

Dies Dominicus...

Je ne puis pas encore m'expliquer aujourd'hui, à cinquante-deux ans,
la disposition au malheur que me donne le dimanche.

Stendhal
Extrait de la
Vie de Henry Brulard


Nighthawks - Edward Hopper
Nighthawks, Edward Hopper (1942)


Je n'aime pas le dimanche. Je ne l'ai jamais aimé. Jour de la semaine où tout s'arrête, jour officiel du repos. Jour qui me glace le sang.

Je suis angoissée, anxieuse par nature... et je traine ça depuis ma prime enfance. Je me souviens par exemple que lorsque j'allais à l'école primaire, un ramassage scolaire venait nous chercher, mon frère et moi, pile poil devant la maison familiale. Le "ramassage" s'effectuait en voiture, par une dame que nous connaissions très bien (auriez-vous oublié que je suis native d'un tout petit village où tout le monde est forcément de la famille ?!). Autant dire que la dame en question ne serait certainement pas partie sans nous. Mais voyez-vous, j'étais terrorisée à l'idée de rater l'heure de passage de la voiture. Résultat, j'étais déjà au bord de la route, mon cartable sagement posé à mes pieds, au moins 20 minutes avant que la dame n'arrive... Mon frère, lui, était à peine sorti du lit... Il n'a jamais eu ce genre d'angoisse. Mes parents ont bien évidemment essayé de me raisonner, de m'expliquer qu'il ne servait à rien que je m'angoisse pour ce genre de choses, mais que voulez-vous, on ne se refait pas. J'ai bien été "sous traitement" (homéopathique) pendant quelques années, ce qui a un brin calmé tout ça, mais ça n'a rien soigné... Et puis ces angoisses ne vont pas sans quelques douleurs physiques, réelles ou fantasmées... mais des douleurs quand même... d'autant plus douloureuses, d'ailleurs, qu'elles sont incomprises de l'entourage...

Bien... mais quel est le rapport avec les dimanches ? Il n'y en a pas vraiment... Ceci dit, cette anecdote - qui me fait sourire aujourd'hui, même si je sais bien que je fonctionne toujours comme ça - illustre parfaitement cet aspect "angoissé" de ma petite personne. Et les dimanches m'angoissent, encore plus en cette saison. J'ai des images bien précises des dimanches soirs de mon enfance. Ce jour-là, jour officiel de la famille, nous ne dérogions pas à la règle. Nous habitions la maison voisine de celle de mes grands-parents paternels. Ma grand-mère était une vraie matriarche ; je la voyais plutôt comme un tyran, mais passons... Mes oncles, tantes, cousins, cousines venaient donc passer quasiment tous leurs dimanches chez la mamie. C'est d'ailleurs à se demander à quel moment mes tantes allaient visiter leur belle-famille... Mes cousins-cousines s'échappaient de chez la grand-mère pour venir squatter notre maison et nos jeux. Ce n'était pas franchement désagréable, et nous avons d'ailleurs passé d'excellents moments... mais je ne pouvais m'empêcher de penser au moment où tout ce petit monde allait repartir. Ce moment m'angoissait grave... Ils partaient toujours à la même heure, entre 18h et 18h30, la nuit était déjà tombée. Ils repartaient tous vers un monde certainement magnifique, nous laissant, mon frère et moi, dans un silence aussi assourdissant que l'après-midi avait été bruyant... Nous allumions alors la télévision, certainement pour combler ce silence, et c'était toujours les mêmes choses qui passaient : Cat's eyes, l'ours Gaby (du dessin animé Les petits malins), Renard, et plus tard Benny Hill... Et ce moment où nous allumions la télé me foutait méchamment le bourdon... Il signifiait que la semaine allait reprendre, qu'il faudrait repartir à l'école... Je me sentais alors dans un état de solitude extrême, et je me sentais d'autant plus seule que personne ne comprenait. "Profite de ce jour de repos...", qu'ils disaient... Mais je ne pouvais pas... Solitude, incompréhension, angoisse... et les douleurs qui allaient avec...
Rien n'a changé aujourd'hui (hormis la programmation télé, bien sûr !). Mes angoisses dominicales sont toujours bien présentes, même si je les ai apprivoisées. Elles sont largement moins fortes, elles ne génèrent absolument plus de douleurs... mais elles n'ont pas disparu.

Je ne sais pas bien expliquer tout ça. Le dimanche me semble être un sas entre deux mondes, un no man's land. La plupart des gens apprécient ce jour, ils se détendent, ils rencontrent leur famille ou leurs amis, ils pratiquent une activité sportive ou autre... Les gens aiment à vous dire : "Rhôoo, vivement dimanche !!" ... Ben moi, je me sens bien plus à mon aise le reste de la semaine...

Je sais, je sais... j'ai un besoin très urgent d'aller consulter un psy...

Heu... pour l'illustration, ne cherchez pas de lien particulier avec mes angoisses ou avec les dimanches... C'est simplement qu'il m'inspire de la solitude, un mélange de tristesse et de mélancolie, et un soupçon d'angoisse aussi... Je suis certaine que cette scène se déroule un dimanche soir... voilà voilà...


2 commentaires:

Anonyme a dit…

C'est très bien expliqué et ça m'a beaucoup ému.(le blues du Dimanche)
Le Dimanche annonce le Lundi , premier jour de servitude...

Anonyme a dit…

Ne t'en fais pas Princesse ! Perso, je ne t'enverrais pas chez un psy ! Ce blues du dimanche, je le comprend parfaitement. Peut-être parce que je l'ai ressenti également. En un peu moins fort, certes.
Dimanche où riment ennui, tristesse, temps morne et grisâtre... Me trompè-je ?
Tiens, je t'offre une chanson pour la peine !

http://www.deezer.com/track/20977

Bah t'en fais pô, si ce jour n'a rien d'attirant en premier lieu, ca doit être un des seuls où on peut se mater un film long mais néanmoins incroyablement génialissime ! Ah si si !
Vient chez moa, tu verras... :-D

Allez, chasse moa ce blues Princesse, si je te décrivais le temps de ce mardi, ça pourrait t'achever ! lol

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